Un article sur les apports d’oxygène en vinification a déjà été publié en 2006 par le Comité Champagne (Le Vigneron Champenois, septembre 2006) mais ne s’était intéressé qu’aux apports quantitatifs et non aux effets de cet oxygène sur les vins. Un autre article a été publié en 2022 (Le Vigneron Champenois, juillet-août 2022) et avait permis d’obtenir des ordres de grandeur de reprise en O2 par les moûts au cours des étapes du pressurage et du transport. A la suite de ces articles, la question des impacts organoleptiques sur le vin était restée en suspens et nous cherchons à y répondre ici.
Partant du constat de 2018 où de nombreux brunissement des moûts, la casse, ont pu être observés, l’impact de ce brunissement prématuré du moût sur le vin s’est posé. En effet, pour de nombreux élaborateurs champenois, un moût oxydé est très souvent écarté et n’est pas considéré comme qualitatif, mais qu’en est-il vraiment ? Quelles sont les conséquences de la casse des moûts sur le profil sensoriel des vins et faut-il maîtriser cette oxydation enzymatique ?
Sulfites : de la demi-dose à la non-dose ?
En Champagne, l’itinéraire de sulfitage "demi-dose" propose déjà une réduction de 50 % des doses de sulfites ajoutés à chaque étape d’élaboration, en complément d’une maîtrise de la microbiologie et de l’oxygénation des vins. Il permet d’obtenir des vins dont la teneur résiduelle en SO2 est inférieure à 30 mg/L sur les vins finis. Dans cet itinéraire, c’est au stade préfermentaire que le sulfitage est le plus important : 3 à 4 g/hL. L’O2 dissous au cours des opérations préfermentaires déclenche des réactions d’oxydation enzymatique en cascade qui vont mener à un brunissement : on parle alors de casse oxydasique (figure 1). Cette casse commence déjà dans le pressoir à l'obtention des jus au contact de l'air et est très rapide.